La folie autour des livres de E.L. James a largement dépassé le succès de “Twillight”. Le film tourné par Sam Taylor-Johnson, connue comme photographe et artiste vidéo sous son nom de jeune fille Taylor-Wood, est dans les salles de 60 pays, participe au festival cinématographique de Berlin et est analysé e par une armée de critiques.
Le site du journal The Telegraph annonce que les magasins des articles de ménage britanniques ont reçu la recommandation d’augmenter leurs stocks de cordes et du ruban isolant, car après la publication du premier livre la demande de ces articles a boosté, on attend la même chose après le film.
Mais le problème est que le film lui-même est douteux et super ennuyant — on dirait une construction exsanguée d’un drame sur les relations, qui aurait pu être entrer dans la catégorie de guilty pleasure, avec plus d’insolence.
Le sujet de “50 nuances de Grey” est connu en général même à ceux qui n’ont pas lu le roman: l’étudiante de la faculté de belles lettres Anastasia Steele interviewe le milliardaire charmant Christian Grey, il la drague, l’emmène dans un un vol en hélicoptère, offre une voiture et un Macbook, puis au moment d’intimité ouvre la pièce rouge éclatante de BDSM, avoue être dominant et propose de signer un contrat pour devenir sa femme dominée. Le temps qu’elle réfléchit, il tombe amoureux d’elle encore plus, la présente à sa mère et peu à peu dépose le monde entier à ses pieds. Le livre même abonde en scènes de sexe décrites au nom de la personnage principale, riches en métaphores et épithètes et à la fois anatomiquement détaillées pour en prendre exemple. Dans le film ces moments croustillants ont cédé la place à une admiration stérile: quelques épisodes du sexe assez longs sont tournés en détail mais avec la prudence que certains critiques anglophones définissent comme hoplessly softcore et dramaticly mild. Les corps des beaux acteurs Jamie Dornan et Dakota Johnson sont facilement examinables, mais difficile de trouver au-delà quelque chose de vif.
Le film est louangé pour avoir retourné le sexe dans la diffusion en masse. Pourtant cela n’apporte pas grand chose: ayant annoncé ce thème provocateur, le film s’en est éloigné et s’est noyé dans une flaque de rêveries de fillette banales. Le conflit n’évolue pas même avec le budget de 40 millions dollars ! Tout le monde fait semblant que ce film tourne auour la compréhension et pas le sexe. Les personnages n’arrivent pas comprendre eux-mêmes et les auteurs ne les aident pas. Les mêmes répliques se balancent dans les mêmes intérieurs.
Ce n’est pas mauvais juste parce que ennuyant. Rien n’est problématisé, mais quelque chose est imposée. Ainsi, le désir de lier les poignets du partenaire sexuel avec un lacet de soie est défini comme sûrement anormal. La pauvre Ana se tourmente non parce qu’elle essaie de comprendre ou aimer son maître mais parce qu’elle attend juste que Grey devienne “normal” pour elle. Et c’est tout. Les femmes victimes d’amour qui ont vraiement souffert dans d’autres films, par exemple ‘Le dernier tango à Paris” ou “9 semaines 1/2” auraient le droit de lui annoncer un boycottage professionnel.
En voyant les scènes dans la chambre pleine de menottes et grumes, il est logique de supposer que pendant qu’on la fouette doucement sous le hit langoureux de Beoyonce, Anastasia pourrait déjà comprendre ce que c’est en fait. Mais elle n’a pas compris ! Elle s’enfuit dès qu’il la fouette avec une ceinture en cuir. En même temps l’image féministe ne lui est pas propre non plus. Si c’est possible de tirer une conclusion sur la position de la réalisatrice avec tout ces faits, elle serait de présenter le personnage principal comme un con malade juste car il propose le sexe sous une forme spéciale et selon l’accord mutuel, en précisant chaque fois que la partenaire ne va pas souffrir sérieusement. Et il faut lui refuser non parce que ce n’est pas ce qu’il te faut, mais car en général il est impossible de vivre comme ça. Ce n’est pas la meilleure conclusion à notre époque de tolérence… Et si Christian embrassait un homme devant Ana ?
En tout cas, d’ailleurs, le film ne motive pas à tirer des conclusions. Si 50 nuances de Grey restaient du fanfic sans prétendre être un drame sérieux, pas de questions à se poser ! Le même objectif — juste satisfaire les fantaisies de spectateur — est pour les films porno qui aurait pu aussi sauver le film et annuler les questions aux intérieurs du même type, aux dialogues stupides et caractères non développés. Mais c’est pour une autre génération de fans ! Chacun décide pour lui — acheter le café décaféiné, la bière zéro alcool ou voir un film asexuel sur le sexe.